Demeure des Célimus

"Juste un petit coucou ? Cela me parait raisonnable en effet, et loin d'être interdit, selon moi. C'est une bonne excuse !"

Je posai ma tête à côté de la sienne et soupirai. Je préférais lorsqu'il était là ! En fait, il m'avait tellement manqué durant ces longues semaines que je ne voulais plus le lâcher d'une semelle pour le restant de mes jours ! Ca me paraissait être une vraie torture de m'en éloigner ne serait-ce que pour une minute.

"Si si, je trouve aussi que c'est un exploit ! Tu es bien courageux !"

Je fermai un instant les yeux avant de les rouvrir et de tourner mon visage vers lui. J'en profitai pour capturer rapidement ses lèvres avec un sourire.

"Bien sûr que non, nous ne faisons rien de mal !"

Tu as raison... répondis-je de la même manière qu'elle, capturant simplement ses lèvres un petit peu plus longtemps. Que dirais-tu de changer cela? A notre âge, être trop sage n'est guère raisonnable...

Bien sûr j'avais ma petite idée en tête. Elle ne s'était pas imposée dans mon esprit à l'instant même, bien au contraire c'est tout au long du chemin qui séparait ma chambre de la sienne qu'elle avait tranquillement mijotée.

Que dirais-tu si je te proposais de visiter les lieux??? Après tout, la maîtresse des lieux ne nous à pas intimer de rester dans nos chambres et il nous reste une bonne heure de temps à tuer...

Enfin c'était juste une proposition, car rester simplement ici en la tenant dans mes bras me suffisaient amplement. Je serais rester des heures si elle était simplement à mes côtés.

"Trop sages dis-tu ? Moui, peut-être... Et qu'entends-tu par changer cela ?"

Je n'eus pas longtemps à attendre pour avoir une réponse de sa part. Visiter les lieux ? C'était une bonne idée ! Même si je n'allais pas retenir grand chose, avec mon sens de l'orientation...

"Je suis partante ! Fais-moi visiter cette demeure !!"

Je réfléchis un instant puis souris malicieusement.

"Et je veux voir ton ancienne chambre, celle où tu dormais ! Toi tu as vu la mienne, à mon tour !"

Mais n'as-tu pas déjà vu ma chambre??? Enfin mes chambres, du moins celle des Abysses, ainsi que celle se trouvant dans la Forteresse. Une fois que je t'aurais montrer celle-là tu n'auras plus qu'à visiter celle se trouvant dans le manoir familial. Maintenant que j'y réfléchis, j'ai vraiment habiter dans de nombreux endroits...

J'attendis qu'elle se lève avant de faire de même, m'étirant comme un félin avant de bailler. J'allais définitivement bien dormir cette nuit. Jetant un coup d'oeil à Amy, qui par miracle s'était réveillée j'allais jusqu'au berceau pour la prendre dans mes bras. C'est fou ce que c'était une enfant facile. C'était surtout du au fait qu'elle ait les mêmes horaires que nous. Ma fille était vraiment parfaite...

Partons à la découverte de la chambre perdue alors!

"Oui je sais. Mais comme ça, ce sera presque complet ! Toi tu as vu toutes mes chambres... Bon, je n'en ai qu'une, donc c'était facile !"

Je soupirai et me levai en m'étirant très légèrement. Pas autant que lui, quoi.
Amy se réveillant, je voulus aller la prendre dans mes bras, mais Valdios s'en chargea avant moi. Ce n'était pas une si mauvaise chose !

"Tu fais un excellent père, tu sais..." soufflai-je avant de lui ouvrir la porte.

Cette réflexion me faisait repenser à ses différents refus quant à la reconnaissance de notre fille. Ayant soudain un coup de blues, je respirai pour me reprendre : ce n'était pas le moment !

"Ca a l'air vraiment grand, en plus !"

Ah bon??? D'un autre côté cela ne fait même pas vingt-quatre heures que je me comporte vraiment comme son père, je me contente donc d'agir à l'instinct. C'est plutôt toi qui est une excelente mère. Faire ainsi face à tes responsabilités envers ton royaume et ta fille, cela n'est pas donner à tout le monde. Je m'en veux de t'avoir laissée toute seule...

Voyant qu'elle passait à autre chose, je préférais faire de même et rejoignis le couloir avec Amy. Il faisait toujours aussi agréable, aucune couverture n'était donc nécéssaire pour la tenir au chaud.

Oui l'endroit est assez grand. Mais nous ne pourrons visiter que quelques coins. Déjà, lorsque je vivais ici, de nombreuses pièces n'étaient pas accesible. Il semble qu'elles renferment des secrets des plus intéressants mais jamais je n'aurais oser y entrer...

"C'est vrai que l'endroit parait grand ! Et il doit sûrement l'être, mais certainement pas autant que le palais d'Eternia !"

Je réfléchis à ses paroles avant de reprendre, une lueur de curiosité malicieuse traversant mes pupilles.

"Des secrets, dis-tu ? Et tu 'n'aurais' jamais osé y entrer ? Cela veut-il dire qu'à présent, tu en aurais le courage ?"

Je le défiai du regard, attendant avec une certaine impatience sa réponse.

Le courage? Sincèrement Serenity, je peux te dire qu'il ne s'agit pas de faire preuve de courage mais plutôt de la plus grand des folies. Si la vieille sorcière devait nous y prendre, elle ne se contentera sûrement pas de nous réprimander. Je la vois même bien, nous jeter dans le lac...

Je n'étais absolument pas lâche, je ne voulais simplement pas m'attirer des ennuis supplémentaires. Pourtant ce n'était pas l'envie qui me manquait, je me serais même bien amuser si j'avais l'occasiond découvrir ce que ces pièces renfermaient. De terribles secrets bien garder ou simplement des objets qu'elle avait peur de se faire voler.

Désolé mais tu devras te contenter des pièces accesibles.

Je soupirai, déçue par sa réponse. Moi qui avais espéré un peu d'aventures en sa compagnie, je ne pouvais en effet qu'être déçue par son sérieux si soudain ! Mais je devais concéder qu'il avait raison, ce n'était pas la chose la plus appropriée à l'endroit... Dommage !

"Oui, je comprends... Mais tu ne devrais pas l'appeler la vieille sorcière, ça ne se fait pas !"

Un peu refroidie, mais pas entièrement, je lui lançai un sourire énigmatique.

"Imagine qu'elle t'entende ainsi la nommer ? Que crois-tu qu'il t'arriverait ?"

Attendant encore un instant afin de laisser mes mots imprégner l'air, je finis par délier ses bras pour prendre Amy dans les miens. Il l'avait eue tout le trajet, c'était un peu à mon tour de la cajoler !!

"Je m'en contenterai. Après tout, je dois être en présence du meilleur guide de cette contrée, alors cela ne peut qu'être intéressant !"

S'il devait m'entendre, quelques secondes lui suffiraient pour m'envoyer valser à travers la fenêtre. C'est une impulsive. Je vais donc suivre ton conseil en évitant d'en parler tout court.

Faisant la moue de manière boudeuse, je la laissais me délier les bras pour qu'elle puisse prendre Améthyste dans les siens. D'accord je la tenais depuis longtemps mais il n'y avait rien à faire, je ne m'en lassais pas. La tenir contre moi était tellement appaisant.

Je ne dirais pas vraiment ça, mais si ça peut te faire plaisir de le penser. On commence par mon ancienne chambre je suppose...

Nous prîmes donc une nouvelle direction, quittant l'aile des invités pour nous enfoncer dans les terrifiants quartiers de la famille habitant cette demeure. Passant quatre portes, je m'arrêtais devant la cinquième et tentais de l'ouvrir. Par cela se solda par une réussite, laissant entendre le déclic d'ouverture. Y pénétrant le premier, je soufflais une flamme dans l'obscurité. Celle-ci donna naissance à une dizaine d'autres flamèches qui allèrent se lover contre les mèches de bougies présentent dans la pièce.
Malgré les années d'absence, cette chambre paraîssait toujours très bien entretenue. Même pas un milimètre de poussières couvrait les meubles et des bûches étaient encore présente dans la cheminée.

Nous y voilà...

Embrassant la pièce du regard, mes yeux se stoppèrent durant quelques secondes sur chaque objet présent. Le lit dans un coin de la pièce face à une grande baie vitrée, des toiles vierges et d'autres qui ne l'étaient plus entassées à côté d'un bureau lui-même ensevelit sous les livres et les parchemins, une bibliothèque trônant à l'opposé de la porte menant à la salle de bain, sans oublier bien sûr un nounours en tissu à l'allure douteuse et quelque peu déchiré.
Nounours? A cette réfléxion, il ne me fallut que quelques instants pour me précipiter sur le lit, m'y jetant littéralement pour l'attraper et le planquer sous les oreillers. Hors de question qu'elle voit ça ou ma virilité serait à jamais mise à mal.

"Il ne sert à rien de bouder, Valdios !" lui dis-je alors qu'il faisait la moue. Je lui offris un sourire en retour.

Ensuite, je le suivis parmi les couloirs jusqu'à une porte précédée de quatre autres. Il se battit un instant avec elle avant de parvenir à l'ouvrir. Il alluma alors les bougies d'une façon très... pratique, dira-t-on.
La chambre en elle-même était très propre, et assez coquette. Il y avait des tableaux un peu partout, achevé ou non, parfois vides de toute substance. C'était une facette de Valdios qui m'avait toujours fascinée : son don pour la peinture. Je n'avais hélas pu profiter que d'un seul portrait, celui qu'il avait fait de moi. Portrait magnifique, d'ailleurs ! Mais là, je pouvais contempler à loisirs ses anciennes toiles, assez sombres, il fallait bien l'avouer.

Un instant perdue dans les diverses représentations qu'il avait peintes, je ne remarquai que tardivement son geste fébril. Je m'approchai de lui, piquée au vif dans ma curiosité.

"Que caches-tu là ?" lui demandai-je en lâchant Amy d'une main pour extirper l'objet dissimulé sous la masse de tissu.

Ce n'était autre qu'un vieux nounours, qui lui avait sans doute appartenu il y a de cela quelques années. Je souris en le voyant. Je n'aurais pas pensé qu'il en avait eu un.

"C'est adorable !"

Mais si tôt cette phrase prononcée, j'eus l'envie de le taquiner un peu.

"Mais dis-moi... tu ne m'avais pas dit que tu avais toi-même un doudou pour dormir ! Aurais-tu aussi des poupées ? Ou des peluches ????"

Amy regardait avidemment le bout de chiffon dans mes mains. Je le lui donnai avec une très légère appréhension : on ne savait pas combien de temps c'était resté là, ni s'il était exempt de tous risques. Mais bon, elle le voulait tellement !

"Je suis jalouse maintenant !! Ce n'est pas juste, moi je n'ai jamais eu que toi !"

Une fois mon geste de survie accomplit, je m'étais contenter de m'asseoir au bord du lit, tentant de prendre un air, un tout petit peu plus naturel. Mais il fallait croire que cela était inutile. De un, j'avais été démasqué et de deux, en essayant d'être naturel, j'avais l'air parfaitement suspect.

Euh rien. Rien du tout... tentais-je de mentir lorsque je la vis approcher.

Elle eut vite fait de s'emparer de mon nounours. Décidément, les oreillers n'étaient vraiment pas la meilleure des cachettes. Pour la prochaine fois, je saurais au moins qu'il ne servait à rien de tenter de le planquer, elle le trouverait sûrement sans la moindre difficulté.

Des poupées? Hé je ne suis pas une fille! J'avais peut-être une ou deux peluches mais sûrement pas plus.

Bien sûr, je savais exactement où ceux-ci se trouvait et qu'ils était au nombre de trois et pas de deux mais ça, il était hors de question que je lui révèle.

J'étais incapble de dormir sans. Lorsque je suis partit, cela à été une véritable déchirure quant je me suis rendu compte qu'il était rester ici.

Je fus quelque peu étonné d'entendre cela. J'avais toujours cru que Serenity avait été le genre d'enfant à avoir un doudou, voir même peut-être plusieurs.

J'ai une excuse pour ma défense. Il fallait bien que je forme pour devenir un bon doudou pour toi par la suite...

Quelle idée de m'envoyer moi, sa propre nièce, chercher les invités! C'était le boulot des domestiques ça! C'était déjà suffisement pesant de devoir passer la soirée avec eux, mais alors si en plus je devais me les coltiner avant que cela ne commence, bonjour!
Bien sûr, la tâche ne put être simple. J'avais cru que je pourrais simplement me présenter à la porte de leurs chambres et leurs demander de me suivre, mais non ils n'étaient pas là! Il allait donc falloir que je les cherche dans toute le manoir, chose pas vraiment des plus aisée vu la taille de la maison.
Sur ce coup-ci, je décidais de ne me fier qu'à la chance, parcourant les couloirs sans direction précise. Il y allait bien y avoir un signe qui m'indiquerait leur présence.
Je fus donc heureuse t'entendre les pleurs d'un bébé. J'avais su par un domestique que les invités mystères avaient emmener un enfant avec eux. Même si je ne les appréciais guère, les trouvant trop bruyant, sur ce coup-ci je devais avouer que cela me facilitait grandement la tâche. J'allais lui être redevable à ce gamin!

- Parler peluche et autres futilités dans le genre, ce n'est pas très professionel... lâchais-je avec un brin de cynisme alors que je m'avançais dans la chambre pour ramasser le nounours et le rendre au bébé bien installer dans les bras de sa mère.

- Enfin... Majesté ma tante vous demandes un peu plus tôt que prévu. Si vous et votre compagnon voulez bien me suivre...

Ne faisant pas attention à la sinistre petite personne qui l'accompagnait, je voulu sortir de la pièce mais me retournait immédiatement pour leur signaler un détail.

- Ma tante n'aime pas les fouineurs, je ne lui dirais donc pas que vous vous êtes permis d'entrer dans cette pièce sans autorisation mais à l'avenir abstenez-vous de recommencer...

Je voulus ramasser le nounours qui avait quitté les bras d'Amy afin de l'empêcher de pleurer, mais Misha le fit à ma place. Je me souvenais de cette jeune fille qui m'avait rendu visite au palais il y a un petit moment. A ce que je voyais, elle était toujours aussi... cynique, si pas désagréable !

Sachez, mademoiselle Misha, que la vie ne se résume pas entièrement au professionnalisme. Il faut parfois se dire que, même si nous avons des responsabilités, nous n'en restons pas moi des êtres vivants !

Je lui offris un sourire qui se voulait sans aucune rancoeur et la remerciai pour le nounours, ainsi que d'être venue nous chercher jusqu'ici pour nous prévenir des intentions de notre hôtesse. Et puis aussi pour le fait qu'elle nous promette de ne rien dire à sa chère tante.

Nous vous suivons, alors ! Ces couloirs sont traitres, je ne m'y retrouverais pas seule !

Cette fille était d'une candeure exagérée! Je l'avais bien sûr déjà remarquer lorsque je l'avais rencontrée pour la première fois mais là cela semblait encore plus sauter aux yeux. Il n'y avait plus qu'à espérer que cela n'était pas contagieux...

Toujours aussi charmante à ce que je vois Misha...

Puis-ce qu'il se faisait remarquer, je me décidais de préter un petit peu plus attention à celui qui l'accompagnait. Je dois avouer qu'il fallut une demi minute au moins pour le reconnaître, pas qu'il avait réellement changer, juste que Valentyna n'avait pas eu l'amabilité de me dire que c'était lui qui accompagnait la reine d'Eternia. Moi qui m'était attendue à ne plus jamais le revoir entre ses murs.
Pas vraiment de bonne humeur sur ce coup-là, je m'approchais de lui assez rapidement et le toisais dans les yeux sans difficulté. Après tout nous n'avions que quelques minuscules centimètres de différence.

Et c'est toi qui ose me dire ça! Mufle! ajoutais-je après lui avoir infliger une gifle pas des plus gentilles à la joue.

Je jetai un oeil à Valdios, quelque peu surprise. Mais je me repris vite : il avait vécu ici, il était normal qu'il la connaisse ! Mais comment pouvait-elle se permettre d'aller le gifler ??? Il n'y avait que moi qui pouvais faire ça !
Je m'approchai d'eux et fis reculer Misha -qui me dépassait au moins d'une tête, si pas plus-, m'interposai entre les deux jeunes gens.

"Je vous interdis de recommencer un tel geste envers lui ! Je ne tolérerai pas vos agissements plus longtemps ! Veuillez lui présenter vos plus plates excuses, Misha !"

Je la toisai du regard en lui intimant de m'obéir. Après tout, j'étais reine, je pouvais bien faire cela ! Et puis, une certaine jalousie, venue d'on ne sait où, s'emparait de moi. Pourtant, elle l'avait seulement giflée, rien de plus ! Mais c'était déjà trop !

Je suis désolé Majesté mais cela est impossible. Cette gifle, je l'a lui devais depuis un bon bout de temps, j'estime donc que cela ne vous regardes aucunement. Mais ne vous inquiètez pas, c'est la première et la dernière fois que cela arrivera. De toute façon, d'ici quelques jours il est certain que nous n'aurons plus jamais à nous côtoyer...

J'avais bien sûr dit tout cela sans jamais la quitter des yeux. Elle était reine? Et alors je n'en avais rien à faire, après tout elle n'était qu'un des nombreux êtres humains qui vivaient sur cette planète. Qui plus est, elle n'avait aucun droit sur les Territoires Gelés!

Maintenant nous ferions mieux d'y aller. Il serait dommage que le repas soit froid à notre arrivée...

Cédant à la tentation, je jetais un rapide coup d'oeil à Valdios pour voir sa réaction. J'espèrais au moins que ça lui avait fait mal et qu'il comprendrait la raison de tout ceci.
Il ne semblait pas vraiment en colère, peut-être un peu surpris mais rien de bien méchant. Des fois cela aurait franchement aider qu'il soit plus expressif!

Oublie cela Serenity. C'est sûrement mieux... l'entendis-je murmurer alors que je quittais la pièce, les précédant de quelques mètres.

Je ne dis rien, mais j'espérai secrètement moi aussi ne plus jamais avoir à la cotoyer ! Si ça continuait comme ça, elle allait réussir à me mettre en colère, chose que je refusais ! Cela faisait plusieurs années que je tentais de calmer mes ardeurs de ce côté-là, elle n'allait tout de même pas gâcher mes efforts à elle seule !

Valdios me demanda d'oublier et, même si cela était impossible, je hochai la tête en signe d'acquiescement et décidai de passer outre cet évènement pour suivre la petite peste qui nous servait de guide.

Nous déposâmes Amy dans ma chambre et, lorsque j'eus réussi à l'endormir dans un berceau spécialement amené pour elle, je les rejoignis dans le couloir et nous nous rendîmes dans la salle à manger.

Durant le trajet, et surtout en couchant Amy, j'avais réussi à me calmer. J'avais mis tout en oeuvre dans ce but et ce fut ma fille qui parvint à me faire sourire. Elle était tellement adorable lorsqu'elle le voulait ! Et ces quelques minutes d'intimité avec elle alors qu'elle s'endormait m'avait revigorée ! J'étais prête à affronter la terre entière, à présent ! Du moins l'espérais-je...

Décidant de faire profil bas pour le moment lorsque je me retrouverais en présence de Misha, j’avais attendu que les deux femmes sortent avant d’éteindre les chandelles, de la même manière que je les avais allumées, et de fermer la porte de manière sûrement définitive sur mon ancienne chambre. Pourtant je n’y avais laissé aucun regret, j’étais bien trop content de m’être échappé il y a quelques années de cette prison aux allures dorées et confortables d’un noble palais. Tout cela était trop pour moi, je ne supportais pas tout ce luxe et ce protocole qui représentait si bien la famille Célimus. C’était à se demander comment j’avais pu y vivre durant tout ce temps. Jusqu’à ce que nous débouchions dans le couloir qui allait nous mener à nos chambres, je m’étais contenter de marcher derrière elles, creusant la distance de plus en plus au faire et à mesure que mes pas me portaient. Il me fallut quelques minutes pour que je réalise que nous étions arrêter et j’eus alors la désagréable surprise de me retrouver seul en compagnie de Misha qui me prêtait à peine attention. Tant mieux, je comptais bien en faire de même.
Malheureusement, la demoiselle changea rapidement d’avis et elle profita de l’absence de Serenity pour reprendre ce qu’elle avait commencé il y a peu. Décidément, je n’avais pas de chance aujourd’hui, j’allais devoir m’y faire. Après Valentyna, c’était de Misha que j’allais recevoir un sacré savon, je le présentais fortement. Comme à l’accoutumée lorsqu’elle était de mauvaise humeur, l’arrogante slave, c’était bien sûr un doux euphémisme, plaça ses mains sur ses hanches avant de me toiser méchamment. Attention, les hostilités allaient commencer, qu’allait-il bien pouvoir en sortir cette fois ?


-« Pourquoi es-tu revenu ?! Tu avais pourtant juré en partant que tu ne mettrais plus jamais un pied dans cette maison à moins d’être devenu complètement sénile et forcené ! »

Mon dieu mais c’est qu’elle avait fait des progrès la petite. Cela en était presque choquant ! Soit elle me ménageait largement, soit elle avait perdu tout son sens de la repartie. Dans les deux cas, cela me semblait improbable de la voir réagir d’une telle façon. A moins que le fait qu’elle ait posé une simple question soit révélateur ? Peut-être étais-ce simplement par curiosité qu’elle se retenait de m’insulter comme du poisson pourri ? Bref, je devais saluer un tel effort et me comporter en parfait gentleman. Du moins tant que cela serait possible car je n’appréciais vraiment pas de devoir jouer ce rôle. C’était d’un ennuyeux…

-« Il faut croire que je brûlais d’envie de te revoir. Tu m’as terriblement manquée… » déclarais-je avec une pointe d’humour.

-« Arrête avec ton numéro de bellâtre, cela ne prends plus et ne prendra plus jamais avec moi ! »

Quelle réaction ! Avais-je malencontreusement touché un point sensible malgré sa carapace de glace ? Quoi qu’il en soit, cela n’était nullement voulu et je m’en voulais désormais terriblement d’avoir ainsi formuler ma phrase. Pour soulager ma conscience, et lui prouver que ce n’était pas une attaque personnelle, je voulu lui présenter mes plus plates excuses, mais il fallut bien sûr qu’elle se venge sur un plan où elle était sûre de faire mouche.

-« Garde ça pour cette fille ! Cela a dû être aisé pour toi de la manipuler. Tu joues les amoureux fous pendant quelques temps et puis voilà que du jour au lendemain tu vas disparaître en brisant le cœur de ceux qui t’entourent. J’ai de la pitié pour elle, elle ne doit sûrement pas savoir à quoi s’attendre… »

-« Умалчивай ты Misha! Я - никакое настроение которое укладывает твои клапаны не возражая. Меня у также меня есть причины тебя тогда хотеть, мне обгоняет голова и главным образом, тебя не теряет причинять неприятности Serenity *» répliquais-je avec hargne dans ma langue natale. Cela m’était venu de manière instantanée alors que je n’avais plus parler ce langage depuis bien longtemps.

Misha se stoppa un instant, sans doute surprise de m’entendre m’exprimer dans cette langue que je n’aimais guère, mais elle retrouva une certaine contenance lorsque Serenity réapparu après une absence d’une dizaine de minute. Si celle-ci n’avait pas entendu nos dernières paroles, il était certain qu’elle était sourde comme un pot. Là-dessus, je choisis de ne pas m’exprimer tant qu’elle ne demanderait pas une explication d’elle-même et lorsque Misha reprit son chemin vers la salle à manger, je la suivis en traînant les pieds lâchant un négligeant « дура** » qui la fit frémir de colère. La soirée promettait d’être riche en rebondissement.
Lorsque nous arrivions devant les portes de la salle à manger, un climat calme, bien que tendu, s’était à nouveau installé sur le groupe atypique que nous formions. Obéissant à un geste muet de Misha, les deux domestiques qui se trouvaient devant celles-ci les ouvrirent avant d’aller se poster à l’intérieur de la pièce. A notre entrée, les effluves d’un ragout de mouton cuisant à la chaleur des flammes dans la grande cheminée de la salle nous accueillirent. Valentyna avait eu une excellente idée de faire préparer un tel repas, il faudrait bien cela pour nous revigorer de la « balade » en traîneaux par cette température. Personnellement, même après une bonne douche, je me trouvais encore légèrement frissonnant et profondément exténué.

-« Ah vous voilà. Cela tombe bien, la cuisinière vient juste de me signaler que le repas était prêt. »

Avec un sourire des plus sympathiques plaqué au visage, Valentyna se leva de son siège pour nous désigner d’autres chaises libres. Misha, toujours première, alla prendre place au côté de sa tante. Cela ne nous laissa pas franchement de choix et je pris possession d’un siège plus éloigné, laissant le bout de table en face de Misha, à Serenity. Face à son ainée, la désagréable nièce se tiendrait à carreau et cela laisserait le temps à ma jolie princesse de faire un peu la conversation à la Valentyna qui semblait impatiente de l’interroger sur les habitudes et coutumes de son royaume. Tout était tellement différent une fois la mer passée, il était toujours intéressant de se renseigner.

-« Je vais vous faires servir à boire, je suis sûre que vous allez aimer notre jus aux cranberries. »

Exécutant l’ordre indirect qu’il avait reçu, un domestique s’empressa de remplir nos coupes d’un liquide rougeâtre presque transparent. Après lui avoir adressé un bref remerciement, je pris délicatement mon verre pour en boire quelques gorgées. Comme d’habitude, c’était un vrai délice. Observant du coin de l’œil la réaction de Serenity lorsqu’elle avala un peu de ce jus au goût si légèrement acidulé, je me surpris à écouter distraitement les paroles de Valentyna qui continuait à vanter les spécialités de notre pays. Se lançant dans une explication sur les animaux que l’on pouvait trouver dans nos régions elle s’attarda sur le mouton des montagnes aux si longues cornes que l’on dénichait en abondance sur les flancs des montagnes environnantes.

*:"Tais toi Misha! Je suis pas d'humeur à encaisser tes vannes sans répliquer. Moi aussi j'ai des raisons de t'en vouloir alors me prends pas la tête et surtout ne te perd pas à ennuyer Serenity."

**:"Imbécile"